Depuis janvier 2020, le ministère de l’Education nationale a mis en place une « application dédiée à la généralisation de l’éducation artistique et culturelle » (ADAGE). Selon le ministère, « ses ressources en ligne aident à concevoir des projets en partenariat avec des structures culturelles dans l’objectif du 100% EAC ». Qu’en est-il réellement ?
Chaque directeur d’école, qui seul parmi les enseignants a accès à l’application ADAGE, devrait répertorier les projets qui « s’inscrivent dans les axes d’éducation artistique et culturelle du projet d’établissement. », renseigner ce que chaque classe a prévu de mettre en place, et donc faire de la publicité à ce qui est fait dans l’école et dans chaque classe. ADAGE recense et publie donc les projets développés par chaque école, par chaque collègue, au vu et au su de tous les directeurs du département, des IEN et des municipalités.
Assimilé au chef d’établissement, dans la logique de la loi Rilhac, le directeur devrait en outre renseigner les domaines suivants :
- « axes du volet culturel du projet d’école »
- « analyse du directeur ou du chef d’établissement de la politique EAC de l’école ou de l’EPLE »
- « Expression des besoins de formation »
Voilà de quoi nourrir les « auto-évaluations » et les évaluations externes prévues par les évaluations d’école ! Voilà de quoi classer les écoles REP+ dans le cadre de la part modulable de l’indemnité REP+ ! Voilà de quoi mettre en place des accompagnements PPCR ! Voilà de qui remettre en cause la liberté pédagogique de chaque collègue !
En outre, dans la poursuite de l’individualisation des carrières, chaque enseignant devrait construire son CV culturel sur ADAGE car le site enregistrera d’année en année ce que chaque enseignant fera et donc également ce qu’il ne fera pas. Avant chaque rendez-vous de carrière dans le cadre du PPCR, chaque directeur d’école pourra éditer un PDF non modifiable, copie du CV d’ADAGE.
ADAGE, c’est donc également le ?icage des enseignants et des écoles pour les contraindre d’appliquer les contre-réformes ministérielles.
Pour le SNUDI-FO, c’est la mise en concurrence des enseignants au sein d’une école, d’une commune et même d’un département ou d’une académie. Rappelons en effet les propos du candidat Macron lors de la campagne des élections présidentielles : « On va payer mieux ceux qui sont prêts à faire plus d’efforts ». « J’assume plusieurs systèmes de rémunération car ils (les enseignants) ne font pas tous la même chose. »
Accessible aux collectivités territoriales, ADAGE est aussi un nouvel outil de territorialisation de l’Education nationale dans la lignée de la loi sur les rythmes scolaires et des évaluations d’école.
Les municipalités auraient leur mot à dire sur les projets culturels de chaque enseignant de la commune, pourraient décider de ne financer que certains et pas d’autres… Il s’agit donc de permettre encore plus d’intrusions des politiques locales dans la gestion et dans la pédagogie des écoles.
L’application ADAGE est donc un outil permettant de mettre en œuvre les mesures ministérielles (PPCR, loi Rilhac, évaluations d’école, part modulable de l’indemnité REP+…) qui visent à territorialiser l’Ecole, à imposer un management digne des entreprises privées, à mettre en concurrence les écoles et les collègues, à transformer le directeur en contremaître chargé de d’imposer les contre-réformes…
Le SNUDI-FO exige l’abandon de l’application ADAGE et rappelle qu’elle n’a aucun caractère obligatoire. Le SNUDI-FO exige l’abandon de toutes les mesures visant à détruire notre statut et à imposer des méthodes managériales dans les écoles : PPCR, évaluations d’école, loi Rilhac…
Montreuil, le 23 mai 2022