Rappel : La loi du 27 février 1880 est fondatrice de l’Université publique en France, et plus largement est considérée par les juristes comme l’une des « lois constitutionnelles » de la République. Elle établit ce qu’on appelle le monopole de la collation des grades, seul l’État (républicain) pouvant délivrer les diplômes nationaux et les grades universitaires, au sein des seules universités, qui ne peuvent être que publiques et dont l’accès était à cette époque gratuit. Citation :
« Article premier
Les examens et épreuves pratiques qui déterminent la collation des grades ne peuvent être subis que devant les facultés de l’État. (…)
Article 3
Les inscriptions prises dans les facultés de l’État sont gratuites.
Article 4
Les établissements libres d’enseignement supérieur ne pourront, en aucun cas, prendre le titre d’universités.
Les certificats d’études qu’on y jugera à propos de décerner aux élèves ne pourront porter les titres de baccalauréat, de licence ou de doctorat.
Article 5
Les titres ou grades universitaires ne peuvent être attribués qu’aux personnes qui les ont obtenus après les examens ou concours réglementaires subis devant les professeurs ou jurys de l’État »
« À bas bruit », profitant de la pandémie, la ministre Vidal tente de supprimer le monopole de la collation des grades. Elle a pris en effet l’arrêté suivant, concernant la licence et le master :
« Les diplômes nationaux de licence et licence professionnelle, d’une part, et le diplôme national de master, d’autre part, confèrent de plein droit à leurs titulaires respectivement le grade de licence et le grade de master. Les grades universitaires peuvent également être accordés à d’autres diplômes délivrés au nom de l’Etat ou à des diplômes d’établissements publics ou privés, dès lors qu’ils contribuent aux objectifs du service public de l’enseignement supérieur définis à l’article L. 123-2 du code de l’éducation. Ces diplômes sont soumis soit à la réglementation nationale qui les définit, soit, lorsqu’il s’agit de diplômes d’établissement, aux règlements d’études fixés par les instances compétentes ».
Premiers bénéficiaires : les établissements d’enseignement supérieur catholiques (frauduleusement appelés « universités catholiques » depuis l’époque de Pétain, en violation de l’article 4 ci-dessus), les « Cathos », qui auront maintenant le droit de délivrer des licences et masters, voire le doctorat. Mais aussi : la plupart des établissements privés, qui n’auront qu’à remplir un dossier. Mais encore : un nombre incalculable de « formations » privées, parfois éphémères, très souvent de très mauvaise qualité et toujours très chères (de 5000 à 12000 euros environ, pour l’instant).
C’est un recul aussi pour l’ensemble des salariés du public comme du privé, puisque les bases mêmes de l’existence des statuts nationaux et des conventions collectives nationales sont vouées à disparaître.
Enfin, « France Compétences » sera chargée d’établir la liste commune de tous les masters (grades ou diplômes), publics et privés, qui sera enregistrée dans le Répertoire National des Certifications professionnelles (RNCP), dont la composition et la fonction ont été modifiées par la loi « pour la liberté de choisir son avenir professionnel ».
Dans le prolongement de ces dispositions, il est prévu que le grade de master délivré par un jury universitaire (c’est-à-dire formellement présidé par un enseignant-chercheur) remplacerait les cartes professionnelles délivrées par d’autres ministères, telles celles délivrées par le Ministère de la Jeunesse et des Sports aux entraineurs de foot formés par leur Fédération, aux moniteurs de natation, directeurs de salle de sport, etc. Ainsi, dans la discussion du « Comité de Suivi Licence, Master Doctorat », un participant a précisé, à titre d’exemple, qu’il faudrait peut-être exiger qu’il y ait au moins un universitaire joueur de foot amateur dans le jury de délivrance du diplôme d’entraîneur… Sans commentaire !
Pour la FNEC FP-FO, les diplômes nationaux et les grades universitaires constituent des garanties pour les droits des lycéens et des étudiants futurs salariés : droit aux études (accès aux cours permettant la préparation du diplôme supérieur) ou à la formation, droits à une rémunération et une carrière garanties par le Statut (fonctionnaires) ou le contrat établi selon le Code du travail et les conventions collectives (salariés du privé).
La FNEC FP-FO revendique :
- Le rétablissement plein et entier du monopole de la collation des grades : baccalauréat, licence, master, doctorat.
- Le rétablissement du baccalauréat comme diplôme national fondé sur des épreuves nationales, anonymes, terminales, ponctuelles et disciplinaires, dès 2022 !
- L’abandon de Parcoursup, qui dénie aux bacheliers le droit d’accéder à la licence de leur choix (comme c’était le cas jusqu’en 2017) et l’abrogation de la loi ORE.
- L’abandon de la sélection à l’entrée en master et de toutes les sélections non réglementaires entre 1e et 2e année master.
La FNEC FP-FO est aux côtés des personnels qui depuis des années résistent à la destruction du baccalauréat national et à la mise en place du contrôle continu. Elle soutient toutes les initiatives pour le retour aux épreuves terminales, nationales et anonymes dès la session de 2022, pour le retrait des projets locaux d’évaluation. A Nantes, à Tours, des rassemblements sont appelés par les syndicats sur ces revendications. FO appelle les personnels à se réunir pour prendre position et discuter des moyens d’agir pour les revendications : Rétablissement du Bac national ! On ne veut pas d’un diplôme local sans valeur ! On ne veut pas du contrôle continu !
Montreuil, le 21 octobre 2021