Suite à l’assassinat odieux de notre collègue Samuel Paty, tous les personnels sont sous le choc. Mais l’émotion laisse rapidement place à la colère.
Car quelles mesures propose le ministre ? Une usine à gaz pour la rentrée. Deux heures banalisées seraient consacrées à l’échange des personnels entre eux. Puis, l’accueil des classes en co-animation avec le professeur principal et « un autre membre de la communauté éducative, au sens très large ». Des contenus, notamment des vidéos seraient mises à disposition (lesquelles ?). Enfin, tous les élèves seraient réunis dans la cour pour écouter la lecture d’un courrier (lequel ?) et observer une minute de silence. Il a aussi été annoncé un renforcement de la sécurité avec les forces de l’ordre.
Le jour même où ces mesures sont présentées, le ministre Blanquer lance officiellement le « Grenelle des professeurs », un nouveau chantier de destruction des statuts.
Où sont les mesures urgentes de protection des personnels ?
La FNEC FP-FO a demandé qu’il soit donné suite à la demande de saisie du CHSCTD 78 pour l’ouverture d’un enquête sur les mesures de protection mises en place par le rectorat pour Samuel Paty. Le directeur de cabinet du ministre répond : « Tout ce qui pouvait être fait par l’Éducation nationale, l’Éducation nationale l’a fait ». Dans ce cas, où est la plainte déposée par l’État employeur ?
Le gouvernement, par la voix de Jean-Pierre Castex et de Jean-Michel Blanquer, déclare être « aux côtés » de personnels « choyés » pour les « protéger ».
Choyés ? Protégés ? Les demandes de protection fonctionnelle (obligation de prévention et de réparation des préjudices, assistance juridique par l’État employeur) formulées par des collègues menacés ou agressés sont trop souvent mises sous le tapis quand elles n’aboutissent pas à des mesures disciplinaires contre ces collègues… Le droit à être représenté et défendu est piétiné, notamment avec la suppression des Comités Hygiène Sécurité et Conditions de Travail pour 2021. 1800 suppressions de postes sont prévues dans le second degré. La réforme territoriale continue de se mettre en œuvre. La suppression du ministère Jeunesse et Sports marque l’abandon des politiques publiques en faveur de l’éducation populaire et la destruction de la vie associative. Les réformes successives (école, collège, lycée) ont supprimé des centaines d’heures disciplinaires. Le baccalauréat est liquidé. Parmi les personnels qui se sont opposés à cette dernière réforme en exerçant leur droit de grève et leur liberté d’expression, quatre sont actuellement suspendus, sans salaire et font l’objet de poursuites disciplinaires. Le ministre n’a pas levé le petit doigt.
Pour protéger les personnels, le ministre doit satisfaire leurs revendications.
La FNEC FP-FO exige le respect de la liberté pédagogique et de la laïcité
Imposer des contenus aux personnels, faire intervenir des « membres de la
communauté éducative » et des élus dans les écoles, c’est tout le contraire de la laïcité définie dans l’article 1 de la loi de 1905 qui prévoit que « la République assure la liberté de conscience ».
La FNEC FP-FO défend l’indépendance pédagogique, définie dans Le manifeste des instituteurs syndicalistes de 1905 : « Ce n’est pas au nom du gouvernement, même républicain, ni même au nom du Peuple français que l’instituteur confère son enseignement : c’est au nom de la vérité. »
Imposer aux personnels, à l’école, autre chose que la mission d’instruction, c’est exposer chacun à tous les dangers, c’est perdre de vue le sens du cadre institutionnel de la laïcité.
La FNEC FP-FO exige que la liberté pédagogique et la laïcité soient strictement respectées, que le gouvernement donne aux personnels les moyens d’exercer leurs missions, que cessent les contre-réformes.
Elle invite les personnels à se réunir dès la reprise, non pas aux conditions du ministre, mais avec leurs organisations, en réunions d’information syndicale. La FNEC FP-FO invite ses syndicats à proposer aux autres organisations des initiatives communes : délégations et rassemblements devant les DSDEN, les rectorats et le ministère pour exiger la satisfaction des revendications.
Montreuil, le 22 octobre 2020